Comptabilité simplifiée ou en partie double en Belgique? Avez-vous besoin d’un comptable?

Toutes les entreprises sont dans l’obligation de tenir la comptabilité de leurs activités économiques. En Belgique, la loi indique que cette comptabilité doit être “appropriée quant à la nature et à l’étendue des activités”. Les indépendants et les sociétés à responsabilité illimitée, ont en conséquence le droit de tenir une comptabilité simplifiée tant que leur chiffre d’affaires ne dépasse pas 500.000€ par an… Cela dit, vous savez à présent si vous pouvez tenir une comptabilité simplifiée. Vous ignorez néanmoins encore si vous avez intérêt à le faire. C’est ce que je vous propose de voir dans cet article.

Dans cet article, nous commencerons par voir rapidement comment l’une et l’autre fonctionnent. Ce faisant, nous relèverons les avantages et les inconvénients de chacune. Nous verrons ensuite quel est le rôle du comptable dans un cas et dans l’autre. Vous saurez alors si vous avez intérêt à tenir votre comptabilité vous-même et sous quelle forme la tenir.

Fonctionnement de la comptabilité simplifiée (en Belgique)

Le fonctionnement de la comptabilité simplifiée est fixé dans l’arrêté royal du 21 octobre 2018 portant exécution des articles III.82 À III.95 du code de droit Economique.

Tenue d’une comptabilité simplifiée

Il s’agit en fait de tenir au minimum 3 livres reprenant (1) les achats, (2) les ventes et (3) les paiements et un quatrième livre établissant (4) l’inventaire du patrimoine professionnel de l’entreprise en personne physique. Ces livres doivent en outre permettre l’établissement (et le contrôle) des déclarations de TVA (si vous devez en établir… et si vous n’êtes pas certain de devoir, jetez un oeil ici).

La simplicité de la comptabilité simplifiée réside à la fois

  1. dans la liberté qui est laissée à l’entrepreneur pour l’organiser, grâce au peu de règles qui l’encadrent et
  2. dans la simplicité des écritures qu’elle rassemble.

Exemple: enregistrement d’un achat

On enregistrera une facture reçue pour un abonnement de téléphone sur une simple ligne d’écriture dans le livre des achats, aussi appelé journal des entrées. Cette simple ligne reprendra toute une série d’informations dans différentes colonnes:

  • le numéro de l’écriture (et de la facture)
  • la date de la facture
  • le nom du fournisseur, suivi de son numéro de TVA,
  • le total de la facture TVA comprise à payer au fournisseur
  • le montant de l’achat HTVA dans une colonne indiquant qu’il s’agit d’un achat de biens et services divers (on prévoira deux colonnes supplémentaires à utiliser en cas d’achat de marchandises et de biens d’investissement)
  • le montant de la TVA à récupérer dans une autre colonne
  • éventuellement, la date d’échéance de la facture
  • éventuellement, le moyen de paiement utilisé et la date de celui-ci…

Exemple: enregistrement du paiement

Le paiement de cette facture sera enregistré dans le livre de trésorerie, aussi appelé journal financier, sur base de l’extrait de compte en cas de paiement bancaire…  La loi indique que le paiement sera également mentionné soit sur la facture, soit dans le livre des achats. C’est cette deuxième option que j’ai prévue aux deux derniers points de la petite liste précédente. Elle est utile également pour la gestion de la trésorerie. Ces deux colonnes “extra” permettront à l’entrepreneur de savoir quelles factures il doit encore payé.

Avantages de la comptabilité simplifiée en Belgique

Sa simplicité: Il rend possible la tenue de ses comptes par l’indépendant lui-même

Sa flexibilité: Elle rend possible l’ajout d’informations et de colonnes directement dans les livres s’ils sont tenus électroniquement (dans un tableur par exemple). Il est d’ailleurs toujours permis de les tenir sur papier (deuxième niveau de flexibilité).

Son faible coût: Il rend l’activité de l’indépendant plus rentable

Inconvénients de la comptabilité simplifiée en Belgique

Le manque de détails dans l’information récoltée.

En effet, en ce qui concerne l’achat, on saura très facilement dans notre exemple qu’il s’agit de biens et services divers. On pourra également assez facilement calculer le total de ceux-ci pour une période donnée… Par contre, il faudra creuser, revoir ligne par ligne, les achats réalisés auprès de l’opérateur pour isoler les frais de téléphone.
Comme indiqué précédemment, il est néanmoins possible de surmonter cette difficulté à l’aide de tableaux annexes ou de colonnes supplémentaires.

Fonctionnement de la comptabilité en partie double

3 différences entre la comptabilité simplifiée et la comptabilité en partie double

En comptabilité en partie double, les pièces justificatives seront également enregistrées dans des livres journaux au fur et à mesure de leur réception. Trois différences majeures doivent néanmoins être notées:

1. Logique débit-crédit

Chaque écriture comptable va faire appel à au moins deux lignes d’écriture: Une au débit, une au crédit. C’est pour cela que l’on parle de comptabilité en partie double. En effet, comme j’aime le répéter à mes élèves, en comptabilité en partie double, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transfère. C’est cette mécanique comptable qui fait une partie de la difficulté de cette comptabilité mais lui donne aussi tout son intérêt…
Vous comprendrez un peu mieux avec l’exemple de la facture et de son paiement ci-dessous mais voyons d’abord les 2 autres différences.

2. Plan comptable

Chaque élément du patrimoine et de l’activité de l’entreprise est représenté par un compte comptable. Il s’agit en fait d’un code ou d’un numéro tiré (et adapté) du plan comptable minimimum normalisé belge, en abrégé PCMN.

Ce plan comptable est “normalisé” car toutes les entreprises de Belgique, en tout cas celles qui tiennent une comptabilité en partie double, doivent suivre la même numérotation. La normalisation permet aux tiers (client, fournisseur, banque, administration… et contrôleur) de lire, de comparer et de contrôler plus facilement les comptabilités d’entreprises différentes, ou en tout cas les rapports (bilan ou autre) que celles-ci leur transmettent. Ils sauront par exemple que:
– les achats de marchandises seront toujours présentés dans des compte commençant par 60 et
– les dettes fournisseurs dans des comptes qui commencent par 44.

Ce plan comptable est dit “minimum” car toute entreprise est libre de détailler et préciser la numérotation… Selon la nature et l’étendue de son activité et selon l’intérêt du détail pour le gestionnaire, elle pourra par exemple créer autant de comptes commençant par 60 qu’elle achète de matières différentes. Par exemple: 60001 pour les tomates, 60002 pour les oignons…

3. Enregistrement des opérations diverses

En comptabilité en partie double, un livre des opérations diverses, appelées O.D. pour les intimes, complètera les 3 livres (achats/ventes/paiements) déjà utilisés en comptabilité simplifiée. Dans celui-ci, on enregistrera par exemple les écritures de salaires sur base des fiches de rémunération ou les amortissements sur base des tableaux d’amortissement. Les amortissements consistent en la perte de valeur des actifs immobilisés, c’est-à-dire des biens que l’entreprise détient pour les utiliser pendant plus d’une année.

Ce livre des opérations diverses permet en fait de se passer du livre des inventaires prévu dans la comptabilité simplifiée. Grâce à l’enregistrement des OD, l’entreprise ou son comptable sera capable de produire instantanément et aussi souvent que nécessaire le bilan de l’entreprise…

Exemple: Enregistrement d’un achat

La même facture reçue pour un abonnement de téléphone désigne en fait, au moins 3 choses: une dette, un achat et une TVA. Elle sera enregistrée au minimum sur 3 lignes d’écriture dans le livre ou le journal des achats:

  • Une première ligne (au débit) indiquera la charge (montant HTVA) dans un compte 61xxx à choisir dans le plan comptable utilisé par l’entreprise
  • Une deuxième ligne (au débit) indiquera le montant de la TVA à récupérer sur la facture dans un compte 411xxx selon le plan comptable de l’entreprise
  • La troisième ligne (au crédit) indiquera la dette envers le fournisseur (montant TVA comprise) dans un compte 440xxx, le plus souvent ‘auxiliarisé’. Les programmes comptables partagent le plus souvent le compte 440xxx entre les différents fournisseurs de l’entreprise, les auxiliaires. Cela permet de rependre leurs données complètes (Nom, adresse, numéro de TVA…) dans une autre table/partie de la base de données.

Un en-tête complètera ces lignes d’écriture. Il reprendra les informations générales de celle-ci. On y retrouvera:

  • la date de la facture,
  • le numéro de la facture,
  • celui de l’écriture comptable et
  • toute autre information que le comptable ou le gestionnaire jugera utile, comme par exemple une description de l’opération (abonnement du mois MM).

Exemple: Enregistrement du paiement

On enregistrera le paiement de cette facture sur base d’un extrait de compte avec

  • Une ligne au débit du compte fournisseur auxiliarisé qui viendra annuler la dette. Le comptable le lettrera avec la ligne provenant de l’enregistrement de la facture. Cela montrera, en plus d’un solde correct, que la facture a été acquittée.
  • Une ligne au crédit du compte bancaire, représenté par compte comptable 55xxxx dans la comptabilité de l’entreprise.

Un en-tete complétera ici aussi ces deux lignes d’écriture. Celui-ci reprendra au minimum le numéro de l’extrait, la date du paiement et le numéro de l’écriture.

Autrefois, avant les ordinateurs, la comptabilité était tenue dans de vrais livres “papier”… On enregistrait l’opération (par exemple l’achat de communication téléphonique) dans le livre des achats. On la recopiait ensuite dans le grand livre des comptes (même info mais présentée compte par compte et non plus opération par opération). Pour vérifier que l’on ne s’était pas trompé, on transférait ensuite les soldes des comptes dans une balance de vérification. A partir de celle-ci, on établissait le bilan de l’entreprise et on calculait son résultat, toujours à la main.

Aujourd’hui, la comptabilité en partie double est systématiquement tenue de façon informatisée. On enregistre les 2 écritures décrites ci-dessus via des livres journaux différents, dans une base de données globale. A partir de cette base de donnée, le comptable pourra tirer différents rapports plus ou moins synthétiques:

  • des détails compte par compte (équivalents au grand livre des comptes des temps jadis),
  • des listes de factures ouvertes,
  • un échéancier de paiement,
  • le compte de résultat ou le bilan de l’entreprise…
  • ou même sa déclaration de TVA…

Avantages de la comptabilité en partie double

Le niveau de détails possible grâce à la personnalisation du plan comptable minimum normalisé

La facilité de création de rapports grâce au livre des opérations diverses et à l’informatisation de la comptabilité en partie double

Inconvénients de la comptabilité en partie double

La difficulté de compréhension de la mécanique débit-crédit

La difficulté des écritures de comptabilité avancées

La nécessité d’un programme comptable payant

Le recours à un comptable ou à un expert-comptable payant

Avec ou sans comptable?

En 10 années d’enseignement de la gestion, j’ai souvent entendu mes étudiants dire qu’ils feraient appel à un comptable… J’en ai également vu beaucoup revenir pour savoir si j’en connaissais “un bon”. En effet, la plupart des comptables remplissent correctement leurs obligations légales (tenir correctement votre comptabilité et rentrer les déclarations de TVA et d’impôt à temps). On attend souvent d’eux plus que ce qu’ils sont capables de donner (et pour quoi nous serions prêts à payer).

Rôle du comptable

Ils gèrent la comptabilité de leurs clients, s’assurent de l’administration de leurs factures et des autres pièces justificatives. Ils donnent des conseils fiscaux si leur client le demande ou, parfois de façon proactive, à l’avance, pour certains d’entre eux. De la même manière, ils peuvent donner des conseils de gestion. Ce ne sera que rarement le cas, en tout cas vis-à-vis de leurs petits clients ou vis-à-vis de clients qui ne maitrisent pas les bases de la finance. Un comptable n’est pas un formateur. En outre, ils ne gèrent pour ainsi dire jamais la trésorerie de leurs clients, et les délais de paiement… Ils ne font pas tout!

Obligation de passer par un comptable

Il n’est absolument pas obligatoire de faire appel à un comptable pour tenir la comptabilité de votre entreprise. Seule une obligation de faire vérifier les comptes par un expert comptable une fois par an s’impose aux sociétés à responsabilité limitée.

Comptabilité tenue par un comptable

Si vous décidez de faire appel à un comptable, ce qui reste vivement conseillé, il tiendra à coup sûr votre comptabilité en partie double. Même si vous êtes indépendant et que votre chiffre d’affaires est inférieur à 500.000€. Il la tiendra d’abord pour pouvoir établir des déclarations de TVA… en général tous les trimestres. La plupart d’entre eux enregistreront donc les documents à cette fin et il sera impossible d’obtenir n’importe quel rapport, à jour avant le 20 qui suit la fin du trimestre…

Votre responsabilité d’entrepreneur

…Suivre ses comptes et, en particulier, anticiper les questions de paiements sont pourtant deux responsabilités du gestionnaire. La seconde est d’ailleurs le seul moyen de se protéger d’une éventuelle faillite. Pour ce faire, l’entrepreneur utilisera des outils proches de la comptabilité simplifiée. Ils lui permettront de payer ses fournisseurs à temps et d’envoyer des rappels à temps aux clients qui trainent. Ils lui permettront aussi de suivre l’état de votre compte bancaire.

A vous de choisir!

Il vous revient donc de faire appel à un comptable professionnel ou non. Si vous le faites, il tiendra pour vous une comptabilité en partie double. Ceci ne vous évitera pas de suivre les finances de votre entreprise…

Qu’en pensez-vous? Que faites-vous? Qu’allez-vous faire? Etes-vous satisfait de votre comptable? Avez-vous déjà expérimenté ses limites? Partagez votre expérience ci-dessous, elle aidera les prochains lecteurs…

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